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Le bonheur des dames

Emile Zola








  • Poche : 542 pages
  • Editeur : Le Livre de Poche; Édition : Le Livre de Poche (1997)
  • Collection : Le Livre de poche
  • Langue : Français











C’est sans doute celui que je préfère! L’un des plus bienveillants pour son personnage principal, qui s’en sort plutôt bien, compte tenu de la précarité de sa situation lorsqu’elle débarque à Paris, orpheline flanquée de ses deux frères, mal accueillie par son oncle qui lui avait pourtant naguère proposé de l’aider. C’est par bonté d’âme qu’un marchand de tissu l’emploie, malgré ses difficultés liée au développement d’un magasin d’un genre nouveau, qui donne son titre au roman : Au bonheur des dames. Il ne faudra pas longtemps pour que Denise y fasse ses premiers pas dans la vente, avec des débuts extrêmement difficiles, tant les péronnelles en place sont promptes à la méchanceté. Quant à son frère qui court le guilledou et réclame sans cesse de l’argent pour payer ses frasques, il contribue au dénuement  de la jeune fille. Mais elle est obstinée et vaillante. 


Le flair du jeune et ambitieux Octave Mouret, qu’on a connu papillonnant et opportuniste dans Pot Bouille, se confirme. Peu en peu il met en place une machine de guerre qui va broyer un à un les petits commerces environnants, avec une politique du prix d’appel cassé, sur lequel les petites échoppes ne peuvent s’aligner, et attirant ainsi le tout Paris qui dépense sans compter dans les rayons débordant d’un luxe d’articles tentants. (Les portraits de ces femmes hameçonnées ne sont guère flatteurs). 


Toute cette histoire de commerce est égayée par les récits des amours licites ou illicites, et surtout par la passion qui dévore Octave Mouret pour Denise, qui le fait tourner en bourrique, sans calcul de sa part. 


C’est aussi un état des lieux de la société de la fin du 19è siècle qui voit la naissance d’une économie de consommation écervelée, conditions précaires des employés, (même si Denise, usant de son influence auprès du patron parviendra à adoucir le sort de ceux ci).


Comme dans Le Ventre de Paris, Zola excelle à décrire l’abondance : rayons débordant de marchandises, décorations luxueuses, mises en scènes pour attirer la foule des pratiques, bénéfices faramineux. Tout cela contraste avec la misère de ceux qu’il contraint à mettre la clé sous la porte. 

Très belle fresque sociale, qui mêle passion et regard acéré que l’évolution de la société en pleine mutation. 



Ce lundi là, le 10 octobre, un clair soleil de victoire perçat les nuit grises, qui depuis une semaine assombrissaient Paris. Toute la nuit, il avait encore bruiné, une poussière d'eau dont l'humidité salissait les rues ; mais, au petit jour, sous les haleines vives qui emportaient les nuages, les trottoirs c'étaient essuyés ; et le ciel bleu avait une gaieté liquide de printemps.

*

Depuis leur débarquement à Paris, ils roulaient sur la place, ils commençaient leur apprentissage à droite, le finissaient à gauche, étaient renvoyés où s'en allaient d'eux-même, tout d'un coup, au hasard de l'intérêt. L'usine chômaient, on supprimait le pain aux ouvriers ; et cela passait dans le branle indifférent de la machine, le rolage inutile était tranquillement jeté de côté, ainsi qu'une roue de fer, à laquelle on ne garde aucune reconnaissance des services rendus. Tant pis pour ceux qui ne savaient pas tailler leur part!

*
Au milieu des murs, à moitié construits, troués de baies vides, les lampes électriques jetaient de large rayons bleus, d'une intensité aveuglante : deux heures  du matin sonnaient, puis trois heures, puis quatre heures. Et, dans le sommeil pénible du quartier, le chantier agrandi par cette clarté lunaire, devenu colossale et fantastique, grouillait d'ombre noire, d'ouvriers retentissant, dont les profils gesticulaient, sur la blancheur crue des murailles neuves.






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