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Abigaël

Magda Szabo







  • Broché : 417 pages
  • Editeur : Viviane Hamy (21 septembre 2017)
  • Collection : Domaine étranger
  • Existe en version numérique
  • Langue : Français
  • Traduction (Hongrois) : Chantal Philippe







Abigaël est un personnage énigmatique, le fil rouge de ce roman qui se déroule en Hongrie pendant la Deuxième Guerre mondiale. Et le lecteur tentera de découvrir ai fil des pages qui se cache derrière l’incarnation de la  statue qui siège dans la cour du pensionnat. Certes, à force d’insister sur les traits de caractère des différents intervenants, l’auteur dévoile à demi-mots le secret de celui ou celle qui veille sur les élèves. 

Lorsque Gina Vitay intègre Matula, ce pensionnat pour jeunes filles dont la discipline et les règles relèvent de la vie carcérale, elle laisse derrière elle une vie frivole, avec une mère de remplacement légère et superficielle. Mais son père ne lui laisse pas le choix : le général la confie aux bons soins de l’institution religieuse sans explication précise.

Commence pour la jeune fille un calvaire : n’ayant pas intégré les codes de survie dans cet univers dépourvu de toute fantaisie, elle se met à dos toute sa classe. Il faudra une tentative avortée de fugue pour que le général lui explique enfin la raison de sa présence au pensionnat pour que Gina entre enfin dans le jeu de ses camarades et se soumette au lois des lieux. 

En arrière-plan la guerre, qui peu à peu influe sur la vie quotidienne des jeunes filles. Par les pertes, par ce qui se raconte de l’existence de résistants, par les bouleversements qu’entrainent des faits apparement anodins.


On observe une montée en puissance de la teneur du roman, qui débute sur un ton de romance, pour peu à peu se transformer en drame individuel et collectif. On  accompagne la jeune fille dans son évolution, de l’espiègle gamine à l’enfant désespérée, que les événements feront entrer dans la maturité.

C'est une écriture est simple, que j'apprécie beaucoup, et l’auteur sait faire passer l’ émotion avec beaucoup d’adresse. 

Recommandé pour  tous ceux qui ont apprécié La Porte.



S’il s’était expliqué, elle aurait accepté n’importe quoi qu’elle pût comprendre et aurait peut-être mieux supporté d’être arrachée à son univers. Au lieu de cela, en déclarant que l’air était meilleur à la campagne et qu’il était temps pour elle d’acquérir davantage que ce qu’une gouvernante pouvait lui apprendre entre les quatre murs de la maison, son père ne lui avait évidemment pas dit la vérité. Il n’avait pas dit la vérité en prétendant qu’il n’en savait pas assez pour s’occuper de sa fille, et serait donc rassuré de la savoir entre les mains d’excellents pédagogues. Tout cela était si peu plausible qu’il ne valait même pas la peine d’y réfléchir. 

*

Une cloche sonna quelque part. La sonnerie réglementaire appelait à se laver les mains, expliqua Mari Kis, c’était l’heure du déjeuner. Torma l’avertit : quand on lui aurait désigné sa place au réfectoire, qu’elle ne s’avise pas de s’asseoir ni surtout de prendre sa cuiller, parce qu’on lisait d’abord un passage de la Bible, ensuite on chantait, puis on priait et seulement après on pouvait commencer à manger. Quand on avait fini, c’était la même chose, on ne devait pas se lever de table avant d’y être autorisé. Il était interdit de parler en mangeant, et on ne pouvait se resservir que si on vous le proposait. Les plats étaient très bons et copieux, mais il fallait toujours attendre la permission de se resservir. Pendant le repas, il ne fallait pas broncher, parce que la préposée du jour faisait la lecture d’un livre écrit par un affreux prêtre suisse, des histoires montrant comment il fallait vivre pour être une vraie chrétienne, et il fallait bien écouter parce qu’il arrivait qu’on soit interrogée après la méditation du soir.

*

Lorsqu’elle entra, il régnait dans la salle un calme paradisiaque. Comme elle dérangeait le cours, madame Gigus lui lança un regard de reproche et lui demanda la raison de son retard.
– J’étais chez monsieur le directeur, et il m’a punie, déclara Gina. Il m’a interdit d’aller en promenade et même à l’église.
– Elle est cinglée, murmura Mari Kis à Bánki. C’est toutes ces punitions qui lui tapent sur le système. Elle ne se sent plus de joie parce que le vieux matou noir lui en a encore collé une.








Magda Szabo  est née en Hongrie. Ses premiers écrits sont publiés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale mais, après 1948, pour des raisons politiques, elle disparaît de la scène littéraire. 


Lorsque ses livres ressortent en librairie à la fin des années 50, l'accueil est enthousiaste.  Elle obtient le prix Femina étranger en 2003 pour La porte.
Elle est aussi l'auteur de L'instant


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