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Navarre ⭐️⭐️⭐️⭐️

 

 Tanguy Pastureau 












Navarre a une idée de génie : pour gouverner ce pays indiscipliné, et tenter de contrôler le bazar que crée la cohabitation houleuse des plusieurs religions, quoi de plus simple que de réunir l’ensemble de ces croyances sous une même bannière : le Navarrisme. Contrairement à l’évangélisation musclée des premiers chrétiens, attirons les foules à l’aide d’un joli chèque et fidélisons les masses avec la menace de devoir restituer la somme en cas de défection….Simple et facile. 

Si cela fonctionne rapidement, la belle progression des adeptes est stoppée par un attentat, qui va bouleverser l’ordre établi …


Certes Tanguy Pastureau n’y va pas de main morte et l’humour peut parfois se chausser de gros sabots, mais l’humoriste qui doit faire réagir son public est là, on ne se refait pas. 


J’ai tout de même particulièrement  apprécié le personnage qui incarne et soutient le wokisme, sans concession, au point de ne plus pouvoir rien nommer. 


Satire de notre société contemporaine, engluée dans ses contradictions, ce roman se lit comme une farce où l’absurde côtoie des fulgurances. 


Un bon moment de lecture.


386 pages Fayard 31 janvier 2024









L'époque voulait que, désormais, toute révolution, passe par un pubard. Aux grandes envolées lyriques avaient succédé une ribambelle d'accroches publicitaires et de pitchs, en « prêt à gober » pour médias paresseux.


*


Mais comment ? balbutia Labbé, qui maîtrisait les codes de la séduction comme le patron du Medef, l'art de monter une cabane dans tôle dans une ZAD.


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L'insecte, par son action, enrichi la terre. L'humain humain, par son action, la détruit.


Tanguy Pastureau 


 

Tanguy Pastureau est un humoriste français, né en 1974. Navarre est son premier roman 


Les invités de Marc

 Tiphaine du Boÿs











Nous sommes invités, en tant que lecteurs, à la fête dans les beaux quartiers de Paris, chez Marc, qui joue l’Arlésienne, même à l’occasion de son anniversaire. Celle qui nous conte cette soirée en gardera un souvenir cuisant, sus la forme d’une blessure à la cuisse, dont elle aura du mal à identifier l’origine…


J’ai été assez peu sensible aux états d’âme de cette jeunesse dorée, et le mystère qui se cache dans cet appartement au décor intrigant est finalement un peu décevant. L’écriture met une surenchère sur des faits  qui sont plutôt banals, ce qui ne peut qu’engendrer un décalage avec l’attente que suscite le montage narratif. 


Peu d’atomes crochus avec l’héroïne, qui semble un peu déconnectée du monde réel, surtout après alcoolisation. 


Une écriture plutôt séduisante et prometteuse mais un sujet qui m’a laissée à distance. 


240 pages Bouquins 4 janvier 2024








Je me sens à des années-lumière de ces considérations. Pire, j'éprouve pour nos voisins, une répulsion viscérale. J'aimerais n'avoir avec eux rien de commun, mais nous accusons un parcours similaire, le vocabulaire dans lequel ils se vautrent, les totems qu'ils brandissent, les succès dont ils se targuent  pourraient être les miens.


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La soirée m'a recrachée sur le palier comme un noyau d'olive. Sans sourciller, j'ai vidé les lieux. J'ai déclaré forfait. À présent, je regrette de m'être inclinée. Briser verres et bouteilles, punir, détruire, voilà qui n'aurait pas manqué de panache. J'aurais dû faire valser le battant, envoyer valdinguer le pan de bois. Les murs en auraient tremblé ; acte dramatique, à la hauteur de la rancœur qui m’anime.




Tiphaine du Boÿs



Tiphaine du Boÿs vit en région parisienne. Diplômée de l’ESCP, elle exerce aujourd’hui en tant que chef de projet dans le secteur bancaire. Les Invités de Marc, son premier roman, a bénéficié de l’accompagnement du comité éditorial de l’école Les Mots. 


Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable ⭐️⭐️⭐️⭐️

 Romain Gary













C’est un Romain Gary vieillissant qui prête sa plume au narrateur. Point de plaintes chevrotantes cependant. Le personnage nous fait grâce des multiples humiliations quotidiennes du senior. Mais le désastre frappe cependant à sa porte : comment satisfaire celle qui illumine ses jours malgré le gouffre temporel qui les sépare ! 


Le sujet est délicat, mais l’esprit et l’humour de Romain Gary font merveille. Pas de trivialité, de vulgarité, même si les choses sont énoncées clairement (en particulier lors de désopilantes consultations médicales).


Le style est léger, avec une pointe d’autodérision bienvenue pour un sujet désespérant. Les personnages secondaires ont du panache, que ce soit la jeune brésilienne objet de tous ses désirs ou l’énigmatique Ruiz.


Un sujet tabou traité avec élégance.


247 pages Gallimard 20 septembre 1978

Caverne des lecteurs 








« Changer le monde ... » Il faut, pour nourrir une aspiration aussi vaste, beaucoup d'humilité dans les rapports avec soi-même, car, dans la mesure où il est authentique, ce genre d'ambition demande d'abord le renoncement…


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Depuis que l'homme rêve, il y a déjà eu tant d'appels au secours, tant de bouteilles jetées à la mer, qu'il est étonnant de voir encore la mer, on ne devrait plus voir que les bouteilles.


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Un jour, mon valet de chambre, Maurice, qui ne pardonne rien à la poussière, soulèvera délicatement mon sourire, lui donnera quelques coups de plumeau et le déposera sur l'étagère de la salle de bains parmi mes autres articles d’hygiène.




Romain Gary


Romain Gary, de son vrai nom Roman Kacew, est un romancier (1914-1980)


Las d'être la cible de critiques le considérant réactionnaire, du fait de son passé de diplomate gaulliste, il invente une écriture vive et drôle, à rattacher au courant post-moderniste, sous le nom de plume d’Émile Ajar. Son cousin Paul Pawlovic prête corps à cette allégorie et, en 1975, reçoit le Prix Goncourt pour "La Vie devant soi". La supercherie est révélée par Romain Gary dans son œuvre posthume "Vie et mort d’Émile Ajar" (1981).

Camille va aux anniversaires ⭐️⭐️⭐️⭐️

Isabelle Boissard












Digne héritière de Bridget Jones, avec deux décennies de plus, Camille promène sa solitude à Paris, après que son mari l’a quittée, pour une femme même pas plus jeune qu’elle ! 

Le calendrier des quinquas semble devoir concéder des créneaux nombreux aux anniversaires, et Camille est même chargée d’en organiser un, « surprise », pour Bianca, la fiancée de son meilleur ami; L’occasion pour Camille de faire un petit tour dans une cité balnéaire fictive de Bretagne ! C’est aussi une opportunité pour faire le point sur sa vie !



Avec beaucoup d’humour, Isabelle tague les travers de nos modes de communication, avec en ligne de mire les réseaux sociaux et les messageries, dont elle connait les pièges et les limites , ce qui ne l’empêche pas  de tomber de sauter dedans à pieds joints. 


On éprouve de l’empathie pour cette héroïne si contemporaine, qui promène sur notre mode de vie un regard à la fois ironique et tendre. 


On retrouve des points communs avec le premier roman d’Isabelle Boissard, la fille que ma mère imaginait, et c’est un atout.


Roman très agréable à lire et autrice à suivre 




256 pages Les Avrils 24 avril 2024 

#Camillevaauxanniversaires #NetGalleyFrance









La morale de l'histoire, c'est qu'on est toujours le connard d'un autre. On est toujours le piéton d'un cycliste, le cycliste d'une voiture, le scooter électrique d’un SUV, le train d'un avion.


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Il avait lu sur son téléphone la définition de la théorie, autrement appelé « loi de Brandolini », « l'énergie nécessaire nécessaire pour réfuter les bullshits est supérieure d'un ordre de grandeur, à celle nécessaire à les produire ».


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Les cadeaux d'anniversaire, ce commerce de l'amitié, où j'évalue ce que je donne, et ce que je le reçois, entre le volontariat et l’obligation,.


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 Il paraît que le cadeau est une nourriture affective sur le modèle dont nourricier que la mère fait à son enfant. Mieux vaut offrir dans ce cas du chocolat plutôt que des endives.




Isabelle Boissard


Après Clermont-Ferrand, l’Italie et Taïwan, Isabelle Boissard vit actuellement en Suède. 


Lire aussi La fille que ma mère imaginait


Le nain de Whitechapel ⭐️⭐️⭐️

 Cyril Anton











Trop différent pour que sa famille accepte ce rejeton pourtant doué, plus même que son frère que la nature n’a pas accablé de la même infirmité, Oscar n’a d’autre choix que de quitter les lieux de son enfance pour se retrouver dans un chenil ! . Whitechapel et sa cour des miracles sera sa destination, et le lieu de mille rencontres. Tour à tour accordeur de pianos, inspecteur de police, puis figure de proue d’un microcosme qu’il abrite dans une boule à neige géante , Oscar occupe une place centrale au sein de ce monde où se retrouvent tous les bannis de la société, handicapés, noirs, homosexuels ou putains. 


Les personnages ne manquent pas d’intérêt  par leur richesse et leur diversité et le cadre gothique ravira les amateurs du genre. 

Mais il manque un fil conducteur  solide, un trame plus nette à ce roman qui part dans tous les sens. Le lecteur est ainsi balloté entre les différents épisodes de la vie mouvementée du héros, au risque de s’y perdre.


Lecture en demi teinte donc, pour un roman au sujet pourtant fort intéressant. 



192 pages Éditions du Sonneur 18 janvier 2024







Le court tissu du temps dans lequel nos noms sont cousus entre deux dates est parfois cruel, et Oscar, malgré la silhouette des gens d'ici, ne devait pas croitre plus haut que le sursaut d'un grand chien noir.


*


Les Bobby furent bientôt sur place. Oscar fut coffré vite fait bien fait à la suite d'un procès fantoche. Le petit homme avait été si bizarrement donné au monde, qu'il ne pouvait guère y avoir que lui pour oter la vie d'une horrible façon.


Cyril Anton


Né à Fontainebleau en 1972, diplômé en lettres modernes et en histoire contemporaine, Cyril Anton est critique littéraire et critique d’art pour plusieurs revues, ainsi que pour les Rencontres de la photographie d’Arles. Il est par ailleurs parolier pour divers chanteurs et groupes. 


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