- Broché: 328 pages
- Editeur : Phébus (21 octobre 2010)
- Collection : Littérature étrangère
- Langue : Français
- Traduction : Philippe Loubat-Delranc
- ISBN-10: 2752903952
- ISBN-13: 978-2752903952
C'est au cœur de la campagne anglaise, à l'époque édouardienne, que se déroule ce huit clos mettant en scène deux familles, voisines et parentes par alliance. Les Donne se sont rapprochés de leurs cousins alors que la santé de leur tante Sukey laissait envisager une fin proche. Lorsque le décès survient, et que les volontés testamentaires de la défunte laissent place au doute quant à une manipulation adroite par la cousine Anna, les langues se dénouent et même si les conventions et le respect scrupuleux d'une étiquette donnent aux conversations un ton convenable, les échanges se font venimeux et la noirceur des sentiments apparaît sous les propos bienséants.
La forme peut surprendre : proche du théâtre, l'essentiel du roman est écrit sous forme de dialogues. Très peu d'action, pas d'interprétation de l'auteur : c'est au lecteur de repérer la progression de l'intrigue et les moments clés qui révèlent derrière les phrases anodines la monstruosité des personnages, la palme revenant à Anna, l'héritière inattendue. C'est une des difficultés de lecture de ce roman, qui requiert une attention soutenue et me semble difficile à lire sans interruption.
La situation des femmes mérite quelques commentaires. Même si l'empreinte de l'époque victorienne reste prégnante, les mœurs évoluent et les femmes jusque-là cantonnées à leur domicile, ignorantes et privées de toute responsabilité sociale, clament leur aspiration à une reconnaissance. Les personnages féminins du roman tirent les ficelles, manipulant les hommes dont l'auteur dresse des portraits peu flatteurs : faibles, handicapés ou oisifs, aucun ne semble suffisamment compétent pour ne pas se laisser manœuvrer par la gente féminine.
L'humour prend ici des allures de cynisme, et repose sur l'absurdité des situations : on peut dans cette famille disserter sur de longues pages sur les conséquences d'être treize à table, même après avoir découvert que l'on est quatorze, ou condamner sans appel une valise pour manque de savoir vivre. Ne nous y trompons pas cependant : ce n'est pas vraiment un roman hilarant. Il faudrait pour qu'il en soit ainsi un parti pris de caricature des personnages qui ne peut se réaliser que par le biais d'une adaptation théâtrale ou cinématographique. Il y a trop à faire déjà pour décrypter les tenants et aboutissants de cette suite ininterrompue d'échanges verbaux pour donner une autre dimension aux personnages.
L'impression globale est donc mitigée : entre la difficulté que représente cette lecture et l'admiration pour ce fin travail d'analyse de ce (dys)fonctionnement familial.
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