Fabien Vinçon
Le petit père du peuple a du vent dans le crâne. Ou du moins, incapable de reconnaître que le poids des ans er des abus pèsent sur son état de santé, attribue-t-il aux vents mauvais qui agitent la mer d’Aral les pensées délirantes qui l’obsèdent et agitent ses membres de mouvements convulsifs contre lesquels les médecins qui l’entourent ne peuvent pas grand-chose, faute de connaissance ou de licence d’action.
La mer d’Aral sera donc asséchée, puisque que c’est la volonté de Staline. Peu importe l’avis des peuplades qui vivent de la pêche sur ses rives. Peu importe le courroux de la géante qui vit au fond de l’eau. Peu importe les avertissements alarmés du chaman. Le jeune ingénieur Léonid Borisov est chargé de concevoir et réaliser ce projet.
Ce qui n’est pas prévu, c’est la rencontre électrique et fatale entre Léonid et la belle et rebelle Elmira. L’amour est incompatible avec le respect inconditionnel des préceptes du régime. Le vent d’Aral souffle aussi dans l’âme tourmentée du jeune apparatchik.
Roman de la folie du pouvoir qui renvoie à une actualité en cours, roman d’amour et fable historique, qui retrace ce projet fou de détourner les deux fleuves qui alimentent le lac pour irriguer les terres aux alentours destinée à la culture du coton. Aucun état d’âme pour la biodiversité !
Superbe lecture, qui évoque les classiques russes, de Boulgakov à Dostoïevski, et qui réussit à allier humour, amour et politique avec beaucoup de grâce.
272 pages Anne Carrière 13 janvier 2023
Sélection Prix orange 2023
On peut se réjouir de constater que la connaissance a des limites. En tant qu’être humain, c’est une manière d’accepter que le monde puisse être difficile à comprendre. Le mystère suscite et aiguise l’intérêt.
*
Le petit père des peuples se jette hors de sa couche, s’écrie dans le noir d’une voix étouffée qu’il cherche à gonfler d’autorité :
-Qui vient m’assassiner ?
Il boxe l’assaillant invisible, oubliant qu’il n’est plus q’un vieil homme dont le nombril tend l’élastique du pantalon de pyjama. Les assauts du vent se jouent de lui jusque’à, l’aube puis l’abandonnent, plaqué au sol, déshonoré et muet.
Fabien Vinçon est né en 1970 à Paris. Staline a bu la mer est son deuxième roman
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire