Alexandre Lamborot
Mourad et Isabelle. Ils s’aiment, énormément, passionnément. Pas calculé, l’enfant paraît. Mais l’amour s’étiole et Mourad n’est plus qu’un souvenir. La jeune mère et l’enfant se construisent à deux. Sans aisance mais tendrement. Vient le temps de l’adolescence pour Célia, en mal d’amour et de reconnaissance. Une première erreur, dramatique, marquera la fin de l’enfance. Aura t-elle retenir la leçon lorsqu’Eldar tente de l’apprivoiser ?
L’histoire se déroule dans un milieu populaire, où poussent autant de fleurs fraiches que de mauvaises herbes. Les dés ne sont pas jetés mais en filigrane les aventures de la chèvre de Monsieur Seguin ne sont pas loin. La quête d’amour, le souhait de vivre ce que les autres semblent maitriser, la difficulté de la mère, seule, pour contrôler ce qui se passe à l’extérieur, la volonté de s’émanciper, tout concourt à s’acheminer vers le drame.
Les personnages masculins ne suscitent pas la compassion, mus par leurs pulsions, bravaches mais liés par le respect de dictats familiaux, ils raisonnent sans mesure, les filles qui résistent sont ignorées, les autres méprisées. D’autant qu’il faut s’affirmer parmi les pairs. Aurait-on pu éviter le pire, question difficile, tant le contexte conduit peu à peu les acteurs vers l’inéluctable.
Un ton particulier pour ce premier roman, un style remarquable, populaire, mais passablement, avec une audace dans le détournement des règles classiques de la grammaire, et l’art de charger les mots d’un sens légèrement décalé et qui fait mouche. Artifice auquel on s’habitue vite et qui laisse parfois sidéré par la pertinence des pirouettes.
Alexandre Lamborot nous propose une chronique sociale bien contemporaine, portée par des personnages dangereux parce que démunis, et des proies faciles, des victimes potentielles qui leur permettront d’assouvir leurs instincts les plus bas.
C’est âpre, violent parfois difficilement soutenable, et ce d’autant plus que l’on sait très bien que la fiction est au plus près de la réalité. Mais c’est aussi une prouesse littéraire, un roman qui marque et laisse des traces.
Merci à Netgalley et aux éditions Lattès pour ce service de presse.
252 pages Lattès 5 mars 2025
#Pâture #NetGalleyFrance
L'année s'était fait dérouler, au rythme de l'usure des éternelles ogives de savon jaune dans les toilettes, des roulades désaxées, que le prof de sport valide quand même. Les bruits de cloche qui font trottiner les mioches, la poussière que fait le talc. Célia avait démarré première en classe et finissait de plus en plus collée par un mauvais gars– c’était à tout allure, les acquis et la mauvaise graine.
*
Célia était toute lancée déversée sur une pente aux virages ravineux, fonçante vers l'avenir et ses crasses, gorgée d’envie et d'urgence, sans coudières, toute déferlante de vie, et ne savoir qu'en faire – Isabelle essayait juste de la regarder fuser sans se cacher les yeux.
Alexandre Lamborot a grandi et vit toujours à Paris.
Il travaille dans le domaine médical.
"Pâture", publié aux éditions JC Lattès, est son premier roman.
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