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Vie de Gérard Fulmard

Jean Echenoz









  • Broché : 235 pages
  • Editeur : Les Editions de Minuit (3 janvier 2020)
  • Collection : ROMANS
  • Existe en version numérique
  • Langue : Français














L’anti-héros est tendance. Gérard Fulmard, avec son nom qui, à une lettre près, évoque un oiseau de mer gris et terne s’inscrit sans conteste dans ce club peu envié des losers, des perdants, souvent assortis d’une propension à se construire des châteaux en Espagne. 

La scène inaugurale ne manque pas d’originalité, de l’inédit à ce jour, mais tout à fait plausible, compte tenu de la colonisation de l’espace qui entoure notre planète par d’innombrables déchets technologiques. Gérard Fulmard y voit un point positif : son propriétaire est décédé, un peu de répit pour régler son loyer…

Ce que l’on sait de sa vie passée, peu de choses, hormis qu’il fut steward, licencié pour faute. 
Ne rêvons pas sur son physique, les années ont peu à peu étoffé une silhouette qui fût peut être un jour longiligne. « Je ressemble à n’importe qui en moins bien ». Au moins de ce point de vue, il ne s’illusionne pas .

Il habitue une rue triste, seul. Et décide donc de reprendre le contrôle de son destin : il crée sa propre entreprise, aussi peu spécialisée que possible : le Cabinet Fulmard Assistance, au sein duquel il se promeut détective. 

De fil en aiguille, le suivi psychiatrique dont il bénéficie, (sans choix personnel, puisque c’est une injonction suite aux débordements de conduite en plein vol) l’amène à fréquenter de drôles de personnages. Et à découvrir les manoeuvres tactiques d’un petit parti politique, peu influant par le nombre mais remarquable par ses excès. 

Gérard Fulmard, anchois au milieu des requins…

C’est presqu’un roman d’espionnage que nous propose là Jean Echenoz, toujours dans ce style particulier, fait de sobriété et de précision; toujours en décalage avec le propos. 

Malgré le peu d’empathie que suscite le personnage, il est difficile de ne pas avoir envie de savoir ce qui va lui arriver. Le milieu politique décrit ne fait pas rêver non plus, mais malgré tout, le roman se parcourt avec plaisir. D’autant que l’humour, assez grinçant, agrémente cette partition d’une symphonie lugubre. 

Inconditionnelle de l’auteur, j’ai apprécié cet opus, mêmes ce n’est pas mon préféré.



Arrive un temps où tout s'érode un peu plus chaque jour, là encore est l'usure du pouvoir : du royaume digestif à l'empire uro-génital, de la principauté cardiaque au grand-duché  pulmonaire, sous protection de plus en plus fragile du limes fortifié de l'épiderme et sous contrôle bon an mal an de l'épiscopat cérébral, ces potentats finissent pas s'essouffler. Il faut alors courir sans cesse de contrôle en examen, d'analyse en prélèvement, de laboratoire en officine, toujours en retard d'un expert en attendant le gériatre  et, à plus pu moins long terme le médecin légiste et son certificat.

*

Parfois des chauffeurs de taxi prévoyants stationnent devant les hôpitaux et les cliniques, se tenant à la disposition des personnes qui en sortent: celles-ci forent une population souvent affaiblie et généralement solvable, qualité requise d'une bonne clientèle.*

*

Quand  il m'a appelé le lendemain matin, j'étais à ma fenêtre où souvent je me poste quand je n'ai rien a faire, très souvent. Je guettais un fait nouveau dans la rue Erlanger, n'importe lequel m'aurait suffit mais je sais bien qu'il ne s'en produit guère, ce n'est pas tous les jours qu'un chanteur de charme s'y jette de son balcon ni qu'un fils de famille jaune y ingurgite une étudiante blonde.












Jean Echenoz
passe la plus grande partie de son enfance à Aix-en-Provence, où son père dirige un hôpital psychiatrique. Il entreprend des études de sociologie et de génie civil et, sans grande passion, entre dans la vie active.
Sa vocation pour l'écriture serait née à la lecture d'Ubu roi. En 1979, il publie son premier roman, Le Méridien de Greenwich (prix Fénéon), aux Editions de minuit. 

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