Gabriel Garcia Marquez
Il est hautement probable que malgré et même peut-être à cause du plaisir que j’ai eu à lire Cent ans de solitude je sois passée à côté d’un certain nombre de messages plus ou moins subliminaux cachés entre les lignes de cette saga qui retrace l’histoire hors du commun de la descendance d’un couple consanguin, créant une communauté villageoise quelque part en Amérique du Sud, si isolée du reste du monde que la gestion des règles de la communauté est extrêmement atypique, tant que le monde extérieur n’existe que par le biais du passage de troupes de gitans éblouissant les foules à l’aide de subterfuges de camelots
D’emblée pour ceux qui oseraient se lancer dans l’aventure, haute en couleurs, le problème des 3 prénoms utilisés pour tous les garçons, en les associant entre eux (Arcadio, Auréliano, José) est facilement contournable : il suffit de chercher sur wikipédia un arbre généalogique de la lignée des Buendia et de l’utiliser en marque page pour ne plus s’y perdre. Cela dit je n’ai utilisé ce subterfuge que dans le dernier quart du livre, ayant abordé entre temps une autre lecture, ce qui m’avait fait un peu perdre le fil.
Ces prénoms ont un rôle important, car ils conditionnent le destin et la personnalité de leur propriétaire. L’auteur facétieux ira jusqu’à inverser ceux d’une paire de jumeaux....
L’originalité de cette histoire familiale réside dans le caractère très entier des personnages, qui vont profondément influencer le devenir de la communauté initiale, en permettant l’intrusion du monde extérieur, à chaque fois source de déséquilibre (que ce soit par la guerre, ou par la visite de gitans, ou encore par l’arrivée d’une ligne de chemin de ferChaque crise marque une évolution spectaculaire du contexte.
Une autre singularité du roman tient à la présence ténue mais quasi constante de la magie qui donne au récit une dimension légendaire et mythique. Lévitations, spectres, chambres abandonnées préservées de la poussière, fécondations prolifiques du cheptel au rythme des copulations de leurs propriétaires...Mais tout n’est pas résolu de cette façon : José Arcadio ne parviendra jamais à transformer le métal en or.
Les personnages féminins mériteraient à eux seuls une thèse de troisième cycle! Ursula, la mère fondatrice de lignée, d’une clairvoyance hors norme gardera presque jusqu’à la fin une emprise remarquable sur les quatre générations qui suivent. Rebecca et Amaranta, éternelles rivales amoureuses, Remedios la femme enfant , l’austère Fernanda...
En filigrane enfin la guerre civile qui oppose conservateurs et libéraux, ces derniers conduits par Auréliano l’un des fils d’Ursula et José Arcadio. C’est l’occasion de mettre en évidence les agissements et manipulations pour le moins malhonnêtes des politiciens. L’on perçoit aussi,le désarroi du soldat quand la guerre n’a plus lieu d’être et le vide de l’existence privée de combats quand ceux-ci ne sont plus nécessaires.
Avant de se plonger dans cette oeuvre foisonnante, j’avais découvert l’auteur en lisant un recueil de nouvelles «L'Incroyable et triste histoire de la candide Erendira et de sa grand-mère diabolique». Cela permet de se familiariser avec l’univers de Gabriel Garcia Marquez et de se retrouver ainsi en terrain connu lorsqu’on aborde Cent ans de solitude. D’autant que l’on aura l’occasion de croiser des personnages déjà rencontrés dans les nouvelles, ce qui crée un climat de familiarité toujours très plaisant
C’est donc une oeuvre dense, complexe, mais aussi drôle, très bien écrite, et qui mériterait certainement plusieurs lectures, permettant de nouvelles découvertes à chaque fois
Voici une très belle critique ! J'ai été moi-même incapable de résumer aussi bien ce roman que j'avais beaucoup aimé. J'ai lu il y a peu, Chronique d'une mort annoncée et je vous le conseille. L'univers de Gabo est tout simplement génial !
RépondreSupprimerMerci beaucoup. J'avoue que j'ai eu aussi le vertige à l'idée de m'attaquer à cette chronique. Et des lecteurs moins ignares que moi en ce qui concerne l'histoire et la culture de l'Amérique du Sud y trouveront certainement à redire. Je note Chronique d'une mort annoncée
RépondreSupprimerMerci de m'avoir permis un regard lucide sur cette brique que j'ai dans mes étagères et que je ne me décide pas à aborder. Vous avez raison de noter "Chronique d'une mort annoncée", jen garde un souvenir fort, une image vive, chaude, très latine. Il y a pourtant presque 20 ans que je l'ai lu.
RépondreSupprimerBon week-end !
Pour ma part je trouve ce roman très surfait et peu brillant, certes bien écrit et témoignant d'une belle puissance narrative chez son auteur, mais totalement creux.
RépondreSupprimerGabriel Garcia Marquez a une imagination foisonnante, mais quel intérêt ? Où est le génie ? Le livre ne présente aucune structure construite, il n'y aucun fil conducteur, aucune analyse psychologique, nous sommes en présence de faits imaginaires relatés avec une densité décourageante, qui plus est sans beaucoup d'humour ni beaucoup d'esprit...
D'ailleurs Marquez a dit lui-même ne pas comprendre le succès de ce livre en particulier : "La plupart des critiques ne réalisent pas qu'un roman comme Cent ans de solitude est un peu une blague". Certains livres sont hissés au panthéon de la littérature mondiale et parois cela reste énigmatique, voire injustifié. Non, non, je ne trouve pas ce livre brillant...
Je préfère largement l'œuvre de Tolstoï qui relève véritablement du génie !
C'est tout le mystère de la littérature d'atteindre sélectivement le lecteur, sans que lui même ne sache réellement pourquoi, tout en tentant humblement d'exposer quelques arguments qui pourraient expliquer cette attirance. C'est la même chose en musique ou en peinture, et l'émotion suscitée est la résultante de d'un réseau complexe de rencontres multiples, dont il est difficile de défaire l'écheveau. C'est pourquoi aucune oeuvre ne fait l'unanimité.
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