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L'art de perdre

Alice Zeniter






  • Broché: 512 pages
  • Editeur : Flammarion; Édition : 01 (16 août 2017)
  • Collection : LITTERATURE FRA
  • Existe en version numérique 
  • Langue : Français












C’est avec beaucoup de sentiments négatifs que j’ai abordé le début de ce roman : de la répugnance, à parcourir une fois de plus le récit des exactions des fanatiques de tous poils, de l’aversion pour ses scènes qui , bien que maintes fois lues ou vues, provoquent toujours cette nausée, comme le font celles qui évoquent les horreurs de la shoah. Pas question dans cet épisode de l’histoire de prendre parti, sinon contre celui de la violence extrême « justifiée d’idoles » ou d’utopies qui sont autant de passeport pour exhumer la nature bestiale de l’humanité. Malgré tout Alice Zeniter,  au-delà de l’évocation de l'insoutenable , parvient à bien mettre en évidence l’absurdité du destin de ceux qui ont fait le choix qu’ils croyaient juste, qui en furent glorifiés pour devenir des parias apatrides.

Puis  vient départ de ce pays auquel la famille doit renoncer , tant la menace est grande et la peur omniprésente. Le chagrin est d’autant plus lourd  que ce qui s’efface peu à peu au rythme de la progression du ferry qui s’éloigne, c’était la réussite sociale, la gloire éphémère du héros, la vie en famille, l’espace et un destin choisi.

C’est là que le récit devient captivant , et riche de faits qui n’ont pas été étalés à la une des médias de l’époque. Il n’y a en effet pas de quoi être fier : avoir utilisé ces hommes à des fins de stratégie militaire, au péril de leur vie, pour les délaisser  , eux et leur famille, , en proie a des conflits de loyauté insolvables , et dans des conditions de vie quotidienne que l’on réserve plutôt à des criminels, pour aboutir au final dans celui fut la genèse des « quartiers », n’a rien de glorieux.

C’est la dernière partie qui est la plus remarquable : Naïma , née en France, d’un père qui a oublié, dans un processus d’auto-protection, finit par retourner sur la terre de ces ancêtres. 
Si Naïma naît sous la plume pour exister au nom d’Alice Zeniter, qui s’est inspirée de la vie de sa propre famille pour écrire ce roman, elle fait partie d’une galerie de personnages dont le portrait est élaboré avec finesse et subtilité, pour le plus grand bonheur du lecteur.

Um mot pour mentionner le magnifique poème d'Elisabeth Bishop qui a inspiré le titre.

Les lycéens ont encore une fois élu un ouvrage brillant, et nécessaire.




Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître ;
tant de choses semblent si pleines d’envie
d’être perdues que leur perte n’est pas un désastre.

Perds chaque jour quelque chose. L’affolement de perdre
tes clés, accepte-le, et l’heure gâchée qui suit.
Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître.

Puis entraîne toi, va plus vite, il faut étendre
tes pertes : aux endroits, aux noms, au lieu où tu fis
le projet d’aller. Rien là qui soit un désastre.

J’ai perdu la montre de ma mère. La dernière
ou l’avant-dernière de trois maisons aimées : partie !
Dans l’art de perdre il n’est pas dur de passer maître.

J’ai perdu deux villes, de jolies villes. Et, plus vastes,
des royaumes que j’avais, deux rivières, tout un pays.
Ils me manquent, mais il n’y eut pas là de désastre.

Même en te perdant (la voix qui plaisante, un geste
que j’aime) je n’aurai pas menti. A l’évidence, oui,
dans l’art de perdre il n’est pas trop dur d’être maître
même si il y a là comme (écris-le !) comme un désastre.

Elisabeth Bishop, Géographies 3

*

Naïma le sait par Wikipédia, pas par les récits familiaux , pas pour avoir arpenté le sol. Quand on est réduit à chercher sur Wikipédia des renseignements sur un pays dont on est censé être originaire, c'est peut être qu'il y a un problème.

*

Le mariage , c'est un ordre, une structure. L'amour, c'est toujours le chaos, même dans la joie . Il n'y a rien d'étonnant à ce que les deux aillent de pair. Il n'ya a rien d'étonnant à conque l'on choisisse de construire sa famille, son foyer sur une institution qui est durable, sur un contrat évident plutôt que sur le sable mouvant des sentiments.

*

Ils voudront que l'amour soit le cœur, la base du mariage, la raison qui pousse à fonder une famille et ils se débattront en tentant d'articuler l'ordre du quotidien et la fulgurance de l'amour sans que l'un des deux n'étouffe ou ne détruise l'autre. Ce sera un combat permanent et souvent perdu mais toujours recommencé.

*

Quand quelqu'un se tait, les autres inventent toujours et presque chaque fois ils se trompent, alors je ne sais pas, peut-être que les écrivains dont vous parlez se sont dit qu'il valait mieux tout expliquer tout le temps




4 commentaires:

  1. Ce livre aurait pu être superbe sans les détails glauques en tout genre : tortures détaillées ... vie dans de petits espaces "où on ne peut pas se branler... car les petits frères dorment à côté, etc." Cela donne plus envie d'arrêter le livre que de continuer à le lire. C'est ce que j'ai fait !
    Dommage
    M. Thérèse Gobbé

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  2. Ennuyeux, difficile à lire dès le début. Bref, je n'ai pas accroché et l'ai abandonné. Le sujet était pourtant intéressant.

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  3. Je peux comprendre votre sentiment. Quelques mois après la lecture, je n'ai pas gardé en mémoire le détail des tortures. il me reste le souvenir d'un intéressant témoignage de ce qu'ont vécu ces familles déracinées

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  4. Coucou ! J'ai beaucoup aimé ce roman. J'ai aimé la description des sentiments, celui de la perte, de l'exil, du déclassement, de la honte. Mais aussi, comme tu dis, cette troisième génération qui cherche à connaître et comprendre ses origines.

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