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Les désenchantées ⭐️⭐️⭐️⭐️

 Pierre Loti





  • Éditeur ‏ : ‎ Folio; Illustrated édition (1 mars 2018)
  • Langue ‏ : ‎ Français
  • Poche ‏ : ‎ 464 pages









Immersion au coeur de Stamboul, au début du vingtième siècle, alors que des petits fantômes noirs tentent de franchir les barrières qui les condamnent à la réclusion dans des prisons dorées. 


Elle sont trois Djénane, Zeyne et Melek, soeurs de coeur et d’infortune.


Lorsque l’histoire commence, Djénane ose, lors de ses derniers  instants de relative liberté, avant le mariage que sa famille a organisé, écrire une lettre à André Lhéri un écrivain admiré par la jeune fille. Le romancier et diplomate, s’il éprouve une attraction profonde pour la ville, vient aussi sur les terres qui abritent le souvenir d’un amour passé, une douce jeune fille qu’il ne peut à présent honorer qu’en lui rendant visite au cimetière, devant la stèle défraîchie.


Djénane et ses amies parviendront à rencontrer l’homme au cours d’escapades interdites et risquées, pour de brefs échanges discrets, qui scelleront cependant une amitié profonde. 


Djénane convaincra André  d’écrire son histoire, celle que le lecteur découvre à travers ces pages…



Pierre Loti nous fait part avec conviction de son amour pour la ville turque, nous décrit avec passion sa beauté, le charme de ses monuments et l’ambiance unique qui l’anime. Le souvenir de son amour défunt contribue à cet attachement. Et pourtant l’attrait pour ce lieu ne l’empêche pas d’en signifier les aberrations, et de dénoncer la prise en otage à vie de ces jeunes femmes mariées de force et condamnées à masquer leur silhouette et leur visage sous de lourds costumes de fantômes. 


Pierre Loti construit le roman en direct, puisque l’histoire relate le cheminement de Djénane qui voudrait que l’écrivain raconte sa vie et celle de ses compagnes.


On est tenté de faire le parallèle avec le retour actuel des exigences masculines sous des prétextes religieux, privant les femmes d’une liberté fondamentale, celle de vivre au grand jour. 


Intérêt à la fois historique, révélant s’il le fallait que rien n’est jamais acquis, et littéraire, berçant le lecteur au rythme de la séduisante écriture de Pierre Loti.



Lecture commune de novembre pour La caverne des lecteurs 



André a eu le vague sentiment que quelque chose commencé dans sa vie, quelque chose qui aurait une suite, une suite  de douceur, de danger et de tristesse.

*

Un soleil d'avril, du même avril, mais de la semaine suivante,  arrivant tamisé de stores et de mousselines, dans la chambre d'une jeune fille endormie. Un soleil de matin, important, même à travers des rideaux, des persiennes, des grillages, cette joie éphémère et cette tromperie éternelle des renouveaux terrestres, à quoi se laissent toujours prendre, depuis le commencement du monde, les âmes compliquées ou simples des créatures, âmes des hommes, âmes des bêtes, petites âmes des oiseaux chanteurs…

*

Les pierres tombales en Turquie sont des espèces de bornes, coiffées de turbans ou de fleurs, qui de loin prennent vaguement l'aspect humain, qui ont l'air d'avoir une tête et des épaules ; au premier temps elles se tiennent debout, bien droites, mais les siècles, les tremblements de terre, les pluies viennent les déraciner ; elles s'inclinent alors en tous sens, s'appuient les unes contre les autres comme des mourantes, finissent par tomber sur l'herbe où  elles restent couchées. Et ces très anciens cimetières, où André passait, avaient  le morne désarroi des champs de bataille au lendemain de la défaite.





Pierre Loti (1950-1923), de son vrai nom Louis Marie Julien Viaud, est un écrivain français qui a mené parallèlement une carrière d'officier de marine. C'est un écrivain du voyage, qui témoigne à travers ses romans de son amour des femmes. 



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