Lucas Belvaux
Un trio diabolique, une thème et des personnages originaux pour un roman que l’on lit sous tension dans la crainte du pire !
Trois personnages :
Skender, un ancien légionnaire clochardisé et par conséquent mis à l’écart par son ex et ses enfants.
Max, homme à tout faire au service de Madame, qui vit des rentes de son mari défunt.
Ce qu’elle va proposer à Skender, et que je ne dévoilerai pas pour maintenir le suspens, même si on l’apprend assez rapidement dans le roman, est une proposition d’une perversion totale. Elle peut le sortir du marasme de sa vie actuelle et mettre à l’abri de tout besoin matériel sa famille, contre un deal à la fois tentant pour l’ancien mercenaire mais terriblement risqué.
Tous les acteurs de cette histoire se livrent les uns après les autres, confiant leur crainte et leurs angoisses, revenant sur les drames du passé et sur le chemin qui les a menés à ce qu’ils sont aujourd’hui.
J’ai craint, et cela a ajouté à l’angoisse pendant la lecture, un scénario digne de Karine Giebel, gore jusque’à l’insoutenable. Mais il ne s’agit pas de ça. Ce qui est traité, ce sont les aléas d’une vie humaine, ballottée au gré des choix plus ou moins risqués qui se présentent. C’est aussi, à travers le personnage de Skender, le rôle fondamental de l’argent pour s’acheter une dignité.
L’étude psychologique des personnages est remarquable et donne sa densité au récit.
Si je devais mettre un petit bémol, c’est le style uniforme des chapitres, qui fait que l'on identifie le narrateur par la relation qui l’unit aux autres et non par une façon de narrer. Le processus est volontaire, mais les premiers chapitres sont déroutants.
Premier roman très réussi pour son ambiance et ses personnages.
Les hommes qui partent à la guerre sont prêts à tuer, pas à mourir. Quand ils le comprennent, il est trop tard
*
Il me demande si je connais beaucoup de coin où on a pas brûlé, étripé, égorgé, torturé, fusillé, écrasé, enterré vivant ou pendu haut et court des pauvres gens au nom de n'importe quel dieu ou prétexte à la con. Parce que tout est bon quand on veut brûler, égorger, piller et violer impunément, non ? On en sait quelque chose. On l'a vu. On l'a fait.
*
Ma haine m’appartient. Elle n'appartient qu'à moi. Je suis seule à y avoir accès. Je lui tiens chaud, je la nourris, elle me le rend bien. Elle n'est pas de celle qui ronge, qui consume, au contraire, elle me trempe comme l'eau froide durcit le métal chaud. Elle me tient debout. En vie. Libérée de l'amour. Pourquoi la nier, la renier, en avoir honte ?
Né à Namur en 1961, Lucas Belvaux est acteur, réalisateur et scénariste. Les Tourmentés est son premier roman.
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