Clarence Angles Sabin
Une terre aride, qui peine à nourrir ceux qui y travaille, un trio de personnages peu bavards, avec au centre cette toute jeune fille qui porte en elle le poids des non-dits familiaux, et l’exprime en mutilant son propre corps. Malu est, elle aussi une solitaire, élevée par son père et sa grand-mère, ignorante de ce qui s’est passé des années plus tôt. La disparition de sa mère ne lui a laissé que peu de souvenirs.
La grand-mère vieillit et perd le fil : ses souvenirs s’évaporent et elle semble parfois se perdre dans un monde parallèle difficile à comprendre pour son entourage. Malu découvre pourtant des traces d’un passé que l’on n’évoque jamais : des photos, en grand nombre, qui démontrent l’amour de celle qui les a faites, pour le détail qui fige une impression, un sentiment.
Il ne faudrait pas oublier Sola, le chien fidèle, témoin des vaines tentatives de Malu pour honorer les dépouilles des agneaux mort-nés.
La lecture de ces pages empreintes de poésie, laisse une impression de sépia, qu’illustre bien le paysage morne d’une campagne aride et peu généreuse. C’est dans ce décor sec que s’épanouit l’héroïne, et tout en cherchant la réponse à ses nombreuses questions.
Même si l’on comprend que cette histoire s’inscrit dans une temporalité actuelle, aux alentours du changement de millénaire, le thème est suffisamment universel pour s’affranchir des repères chronologiques. Malu ne s’engouffre pas dans la frénésie technologique de ses contemporains. Elle fait corps avec la terre, la nature, tissant des liens avec les animaux et cherchant les indices de son histoire dans les silences de ses proches.
Beau personnage romanesque, dans un cadre de fin de règne, et peu d’issue pour rebondir, si ce n’est par la compréhension de ses origines.
Le roman est court, mais suffisamment développé pour en comprendre les enjeux.
Un premier roman déroutant et attractif .
Merci à Babelio et aux éditions Le Nouvel Attila.
192 pages Nouvel Attila 22 août 2025
Masse critique Babelio
Le goût acide de la terre sèche lui brûla le palais. Les gravillons pesaient sur sa langue. Le poids du soleil sur son dos, l'alourdissait. Elle devait se courber en deux pour profiter de l'ombre du chêne, ne serait-ce que de quelques centimètres. Il souffrait lui aussi, sans doute plus qu’elle.
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Les végétaux appelaient la pluie. Un cri désespéré. Malu, son père et sa grand-mère, qui s’attelaient chacun à leurs tâches, s'interrompent immédiatement. Terreuse, mordante, rafraîchissante, ils n'avaient pas senti cette odeur depuis de nombreuses semaines. Un mois et demi sans pluie.
Diplômée d'un Master 2 Métiers du livre de l'Université Paris Nanterre (2019-2020), Clarence Angles Sabin travaille dans l’édition de revues scientifiques. Elle est coordinatrice éditoriale à EDP Sciences depuis 2024.
Originaire de l’Aveyron, elle est fille, petite-fille et arrière-petite-fille d’agriculteurs. C'est dans les paysages qui ont bercé son enfance qu'elle puise son inspiration et nourrit son écriture sensible et ombrageuse. "Malu à contre-vent" (2025) est son premier roman.
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