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Si le grain ne meurt ⭐️⭐️⭐️⭐️

André Gide


  • Poche : 371 pages
  • Editeur : Gallimard (19 mai 1972)
  • Collection : Folio



« Si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul ; mais, s'il meurt, il porte beaucoup de fruit. Celui qui aime sa vie la perdra, et celui qui hait sa vie dans ce monde la conservera pour la vie éternelle ».


Le titre de cet ouvrage autobiographique fait référence à l’Evangile selon Saint Jean, et exprime la dualité de l’auteur, qui aurait pu, tel le grain de blé ne pas mourir et poursuivre le destin tracé par son éducation puritaine, alors que renonçant à celle-ci, il révèle sa personnalité enfouie.



Dans une première partie, Gide évoque une enfance de sale gosse, celui qui mord la joue qu’on lui tend, qui écrase les pâtés de sable de ses petits camarades et se cache sous les tables pour des jeux interdits, sévèrement corrigés au nom de la décence instrumentalisée par le médecin de famille.

Derrière les  souvenirs incertains, modifiés par la reconstruction de l’imagination qui mêle les époques et les lieux, se dessine le bonheur des premières impressions dans un monde qu’on découvre et interprète à l’aune d’une expérience minimale.


On y découvre aussi une scolarité  totalement anarchique, dispensée par des précepteurs éphémères et des cours de piano médiocres qui n’ont pas découragé l’enfant amoureux de la musique. 


Inévitablement cette enfance « confinée » ne développe pas la sociabilité et fait  le lit du désespoir des années de lycée, qui auront malgré tout permis la rencontre d’ amis fidèles .


C’est dans la deuxième partie, qui relate un voyage en Afrique du Nord avec son ami Paul Albert Laurens qui lui fait tourner la page de son éducation protestante, qu’il prend la parti d’assumer son homosexualité.


Gide ne fait pas le fanfaron, il porte un regard sévère sur ses obsessions, et sur l’enfance à la fois privilégiée, (au moins jusqu’à la mort de son père) et ne s’accorde pas de remises de peines. 


Bien entendu, malgré une  pudeur  relative, les pages qu’il consacre à ses relations charnelles avec de jeunes prostitués algériens ne peuvent que choquer. Elles sont à remettre dans leur contexte mais restent inexcusables et inacceptables, par cette recherche de plaisir sans aucune considération pour l’être humain instrumentalisé et avili. Elles sont le témoin d’une évolution des consciences qui ne peut aller que vers l’amélioration du genre humain.


Autobiographie sans complaisance, rédigée avec sincérité et simplicité, qi permet de comprendre un peu mieux l’œuvre et l’auteur.




Un petit sac de filet contenait les plus belles billes, qu'une à une l'on m'avait données et que je ne mêlais pas aux vulgaires. Il en était que je ne pouvais manier sans être à neuf ravi par leur beauté : une petite, en particulier, d'agate noire avec un équateur et des tropiques blancs ; une autre, translucide, en cornaline, couleur d'écaille claire, dont je me servais pour caler. Et puis dans un gros sac de toile, tout un peuple de billes grises qu'on gagnait, qu'on perdait, et qui servaient d'enjeu, lorsque plus tard, je pus trouver de vrais camarades pour jouer.

*

Ce n'est pas un roman que j'écris et j'ai résolu de ne me flatter dans ces Mémoires, non plus en surajoutant du  plaisant qu'en dissimulant le pénible.

*

Les Mémoires ne sont jamais qu'à demi-sincères, si grand que soit le souci de vérité : tout est toujours plus compliqué qu'on le dit. Peut-être approche-t-on de plus près la vérité dans le  roman.




André Gide est un écrivain français, né en 1851. 
André Gide a manifesté une volonté de liberté et d'affranchissement à l'égard des contraintes morales et puritaines, son œuvre s'articulant autour de la recherche permanente de l'honnêteté intellectuelle. L'ensemble de son œuvre est mis à l'Index par le Vatican en 1952.







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