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Le livre des heures ⭐️⭐️⭐️⭐️

 Anne Delaflotte Mehdevi









En l’an de grâce 1468, la jeune Marguerite hante l’atelier d’enluminures qui dresse fièrement son illustre enseigne sur le pont Notre-Dame. Fascinée par l’oeuvre des copistes, elle n’aura pas besoin de l’aide de quiconque pour apprendre à déchiffrer l’alphabet puis un peu plus tard à lire.

La trace écrite n’est pas son seul entre d’intérêt, l’enfant sait regarder et rêve de reproduire la beauté du fleuve et les couleurs des saisons. Si elle broie du noir, ce n’est pas par mélancolie, mais parce que l’expression imagée d’un mal être provient de cette activité bien concrète qui consiste à écraser la matière, végétale ou minérale, qui permet d’obtenir les pigments.


La fillette grandit, sa passion ne s’affaiblit pas, et même si elle doit se résigner à convoler, le livre d’heures qu’elle alimente de ses émotions prend forme. Si ces ouvrages somptueusement illustrés étaient destinés à accompagner le fidèle, jouant le rôle d’un calendrier de prières, les illustrations contenues constituent un témoignage de la vie quotidienne de l’époque. Et dans le cas de Marguerite, on n’est pas loin d’un journal auquel elle confie ses angoisses et ses espoirs.


La passion pour l’art se superposera bientôt à une passion plus charnelle, inscrivant l’intrigue dans l’Histoire de la conquête de territoires inconnus.


Très instructif, le roman se lit avec un grand plaisir, d’autant que le personnage de Marguerite possède une force et une détermination qui en fait une belle figure du féminisme. 


Merci à Babelio et aux éditions Buchet-Chastel


Paru le 6 janvier 2022 224 pages Buchet-Chastel



Elle pose un sarment sur la pierre et le broie, verse dessus un peu d’eau de pluie, broie encore, broie le noir aussi loin qu’elle a de temps avant elle, de force et de volonté. Plus elle broie, plus le noir sera bon. 


*


On croit au moyen âge qu’il en va des femmes et des hommes comme des couleurs. On peut porter une robe rouge avec un manteau bleu ceinturé de vert sans qu’on y voie rien à redire. Mais fondre les couleurs ? Les fondre l’une dans l’autre ? Broyer les pigments ensemble ? A moins d’être gueux, à moins d’être fille exaspérée des méchancetés de samare … Mélanger les règnes ? Mélanger les genres, brouiller l’ordre de la Création de Dieu ? C’est un scandale, une folie, c’est infernal, comme un blanc pur rayé de jaune sale. Comment une chrétienne et un Maure pourraient-ils ne faire qu’un ? Aime-t-on les crapauds, les hyènes, les guêpes à la robe tachée ? 







Anne Delaflotte Mehdevi est une écrivaine française.

Elle suit des études en droit international et diplomatique et pratique le piano et le chant lyrique. De 1993 à 2011, elle vit à Prague où elle apprend et exerce le métier de relieur, parallèlement à son travail d’écrivain.





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