Thierry Clermont
Ce roman ressemble à une visite guidée pour touristes coiffés de casquettes ! C’est un parcours dans Long Island, émaillé de commentaires sur des célébrités oubliées, ayant séjourné dans ces lieux. On y suit des trajets faits de listes d’étapes (peu évocatrices si on ne connaît pas déjà l’endroit), mais aussi des listes d’échoppes et même une liste de traduction de noms d’oiseaux ! Trop de listes !
Beaucoup d’informations donc, avec une intrigue dont les dialogues servent souvent de support à d’autres anecdotes ! Les échanges sont souvent musclés entre les deux frères qui se retrouvent après des années de brouille, pour le mariage du cadet, le narrateur étant sollicité pour être témoin.
Il m’a été impossible d’adhérer au propos et j’avoue avoir survoler certaines pages emplies de détails concernant des stars qui ont eu leurs heures de gloire avant de tomber dans l’anonymat. L’auteur fait preuve d’une érudition remarquable, au risque de laisser le lecteur béotien à l’écart.
C’est dommage car on trouve des passages superbement écrits, qui me font regretter qu’une intrigue plus étoffée et un récit moins didactique m’auraient sûrement passionnée.
240 pages Stock 7 septembre 2022
#LongIslandBaby #NetGalleyFrance
Tous ces visages absents depuis de longues années, marqués ou défigurés par l'âge, les preuves et les offres de la vie, on les reconnaissait, bien sûr, mais ils ne se ressemblaient plus ; ils étaient comme abolis. L'œuvre du temps et la marque de nos renonciations. C'était dégueulasse. Un vrai cimetière de vivant.
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Je devrais voyager plus souvent, me rapprocher davantage des îles. On n'y est, dit-on, au bord de soi-même, à travers des miroirs, des aubaines, des moments de surprises, fugitifs. Le grand corps liquide et son rythme nous ramène à cette impulsion d'horizon qui nous saisit quand on s’y attend le moins. Alors il faut partir, laisser derrière soi l'écume des jours la tourbe de toutes ces nuits gâchées, la peur du lendemain, dans la fureur et l’alcool.
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Ce vaste ciel, je l'ai déjà vu, il y a longtemps ; c'était ailleurs, dans une autre saison. Le reflux de la mémoire s’emmêle ; elle reviendra, avec ses égarement, ses consolations. L’estompe des souvenirs et la lenteur de l’oubli.
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Je suis aussi ce que je lis, ce que j'ai lu, dans les grandes voix d'hier, celles des revenant qui m'accompagnent et me soutiennent. Aujourd'hui que les mots ont été altérés ou vidés de leur sens : révolution, environnement, empreinte carbone, égalité des chances, diversité, vivre-ensemble et parité, quartiers et territoires, frigo connecté, boulghour à tous les étages… Tout ce cirque creux qui tourne la tête aux nouveaux cagots. Une chiasse de mots et de sornettes qu'on voudrait nous imposer au nom du bien commun.
Thierry Clermont, né en 1966, est un journaliste, critique musical et poète français. Il travaille au Figaro Littéraire.
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