Alice Renard
Dès les premières pages, l’alternance des voix du père et de la mère met en évidence les particularités de l’enfant : Isor ne rentre dans aucune case, mettant en échec les éducateurs mais aussi le corps médical qui ne parvient à cerner le problème. Le système éducatif n’est pas non plus qualifié pour contenir et encadrer la fillette. C’est donc à la maison, en observant et en s’adaptant au jour le jour à l’étrange comportement de leur fille, qui ne s’exprime pas à l’aide d’un langage conventionnel mais mime à merveille les intonations et mélodies de langues étrangères qu’elle a captées à la télévision.
C’est à l’occasion d’une garde improvisée chez le voisin, un homme âgé et solitaire que l’enfant semblera s’ouvrir à des intérêts plus larges.
Toute la première partie est virtuose : les points de vue alternés parviennent non seulement à décrire les troubles de la fillette mais aussi restituent à la perfection le ressenti des deux parents, leur détresse mais aussi la distance différente de l’un et de l’autre vis à vis de cette épreuve qu’est l’éducation d’un enfant différent.
L’autrice réussit aussi le challenge de ne pas stigmatiser les difficultés , de mettre en valeur les éléments positifs du mode de communication de l‘enfant, et finalement de ce que cette situation apporte de bénéfices et d’ouverture au monde. Sans en nier cependant les difficultés, la colère inhérente et le désespoir parfois.
« Isor a tracé ce cercle autour de nous (involontairement ?). À l'intérieur, elle a tressé ce qui était naturel, avec ce que ce qui était inouï, ce qu'il fallait faire avec ce qu'il ne fallait pas faire, elle a bouleversé la norme et l'évidence en les faisant glisser vers son invraisemblance et son improbable à elle. Elle a commencé à nous faire vivre là-dedans en nous faisant digérer ses évidence. On nous soustrayant du réel. »
Texte original et bien écrit, ce premier roman nous offre en partage de multiples émotions .
160 pages Héloïse d’Ormesson 24 Août 2023
Prix méduse 2023
Prix de la vocation
Parmi les hommes, je n'ai pas reçu la palme de la virilité. Il faudrait véritablement être à court d'adjectifs pour me décrire comme offensif ou protecteur : je n'ai jamais attaqué ou défendu quiconque de mon existence.
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Pourquoi tout devient-il ridicule à nos âges, vicieux, interdit ? Ce qui est beau devient sale. Même l’or est maculé de boue. Si 80 ans est un âge naturel dans l'existence, pourquoi rien ne lui est-il adapté ?
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Isor a tracé ce cercle autour de nous (involontairement ?). À l'intérieur, elle a tressé ce qui était naturel avec ce que ce qui était inouï, ce qu'il fallait faire avec ce qu'il ne fallait pas faire, elle a bouleversé la norme et l'évidence en les faisant glisser vers son invraisemblance et son improbable à elle. Elle a commencé à nous faire vivre là-dedans en nous faisant digérer ses évidence. En nous soustrayant du réel.
Née à Paris en 2002, Alice Renard est étudiante en littérature médiévale à la Sorbonne. Révélée précoce à l’âge de six ans, la question de la neurodiversité et de l’hypersensibilité l’ont toujours passionnée
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