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Le détachement

Jérémy Sebbane









  • Broché : 277 pages
  • Editeur : Sable polaire Editions (4 septembre 2019)
  • Existe en version numérique 
  • Langue : Français














Ça commençait plutôt bien : une héroïne mytho, et fière de l’être (ou tout au moins prompte à 
minimiser l’importance et l’impact de ses déformations de la vérité), un interlocuteur qui tel un poisson rouge au milieu d’un banc de requin, tente de se frayer un chemin dans les hautes sphères gouvernementales (alors qu’il n’a pas fait l’ENA!), dont l’instabilité n’a d’égale que la mouvance avec laquelle il recherche un compagnon. Ces deux-là étant fort sympathiques , on chemine volontiers avec eux en compatissant aux aléas de leur destin. 

Et puis un mensonge, une ré-interprétation des faits, vient casser la fantaisie. La mythomanie devient érotomanie. Plus qu’un défaut attendrissant, cela devient une pathologie.  Et tout l’art de l’auteur est de nous balader sas que l’on sache tout de suite où est la vérité. 

C’est sur un drame, collectif et individuel que s’achève le récit. Et là on a plus envie de pleurer que de rire.

L’auteur sait manier la langue et manipuler son lecteur. 

N’y a t-il pas cependant un trop grand contraste entre l’entrée en matière, légère et drôle et cette fin autrement grave?  J’avoue avoir mis un peu de temps à comprendre l’évolution du discours, qui sur le moment m’a paru incohérent. Il aura fallu quelques jours de décantation pour que tout prenne sens.

J’en garderai un bon souvenir.







Depuis toujours, j’aime raconter des histoires. Pas mentir. Juste prolonger un peu la vérité. Tenter de rendre la vie plus jolie, plus supportable.
On ne devrait pas me le reprocher. Quand un enfant raconte n’importe quoi en disant qu’il est pompier ou astronaute, on le félicite, on lui caresse la joue en souriant, on se réjouit qu’il ait une personnalité imaginative. Moi, on me traite de mythomane, on dit que j’invente, qu’il ne faut pas m’écouter, que c’est une perte de temps de m’adresser la parole.

*

C’est sûrement de la faute de ma mère. Au lieu de m’offrir des livres pour faire de moi une première de la classe, elle aurait dû m’acheter du Biactol pour faire dégager les boutons que j’avais sur la gueule durant toute ma jeunesse. Peut-être cela aurait permis qu’au moment des slows, plutôt que de me laisser moisir sur les canapés, les garçons, en rougissant, puissent m’inviter à danser. Une adolescence à rester assise en regardant jalousement les autres mimer l’amour et le désir, ça marque. Depuis, je rêve de vivre dans une comédie musicale pour rattraper le temps perdu.

*

Je m’étais réveillé tard. En me sentant coupable d’avoir fait la grasse matinée. Bien que socialiste, j’avais bien absorbé la propagande libérale qui vantait l’effort et faisait l’apologie de la valeur travail. Je préférais, bien sûr, le moelleux de mon lit à midi que les réveils agressifs de sept heures du matin, prélude au sordide enfilage d’un costume-cravate et à la préparation d’un petit déjeuner prestement avalé. Mais la société avait su me convaincre que l’on vous respectait davantage lorsque l’on était un bon petit soldat se levant à horaires fixes et faisant ce qu’on lui demande. Si je voulais être heureux, il me fallait désapprendre tout ce que l’on m’avait inculqué.











Jérémy Sebbane Auteur d'un premier roman "Après quoi on court" et d'un essai "Pierre Mendès France et la question du Proche-Orient".

Il a fait partie de l'équipe de campagne de François Hollande et a été la plume de personnalités politiques de premier plan comme Manuel Valls et Fleur Pellerin 

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