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L'épidémie

Åsa Ericsdotter








  • Broché : 425 pages
  • Editeur : Actes Sud (11 mars 2020)
  • Collection : Actes Noirs
  • Existe en version numérique
  • Langue : Français












L’Épidémie n’est pas celle qu’on croit, même si la Masse critique s’est révélée opportuniste : ici, nous sommes en Suède et la campagne électorale du futur dirigeant s’est axée sur l’obésité. Las de voir ses contemporains représenter un fardeau grevant le budget santé de la nation, l’éradication de ce fléau devient son leitmotiv. 

On commence par les slogans, les campagnes d’information, puis montée en puissance avec la prise en charge des opérations bariatriques par le système de santé national, intervention l’on propose de plus en plus tôt jusqu’à perdre la raison, après les jeunes enfants ce sont les nouveau-nés dont les antécédents familiaux augmentent le risque de les avoir un jour dépasser l’indice corporel ajusté qui identifie mieux qu’une étoile jaune les individus considérés peu à peu comme des criminels. 

Dans un premier temps, l’induction de troubles du comportement alimentaire est un premier effet secondaire, qui touche de près Landon, le héros de cette farce glaçante. 

Et puis comme même les bases de la médecine scientifique sont bafouées, et qu’il existe toujours  dans le pays des résistants, la solution extrême, que l’on pourrait appeler finale est organisée. 

Si le processus remet en place progressivement, il s’accélère, avec le rythme du roman qui devient vite un thriller. Et c’est la boule au ventre que l’on parcourt les dernières pages.

L’obésité devient vite une métaphore d’une autre exclusion, elle aussi orchestrée à grande échelle naguère, avec les mêmes mécanismes et les mêmes dilutions des responsabilités qui permettent aux décideurs de se laver les mains et aux exécutants de nier toute responsabilité, tout est possible. 

Le résultat est un bon thriller, à la fois sans le rythme de la narration et pour ce qu’il suggère  de la capacité des instances gouvernantes de perdre toute capacité de raisonnement logique.

Merci à Babelio et aux éditions Actes sud pour leur confiance.




Depuis l'année dernière, plus de la moitié des églises d'Uppsala s'étaient transformées en centre de remise en forme. Quelques mois auparavant, il était allé jeter un oeil dans l'église Mickaels pour avoir un aperçu du résultat de cette folie. Que comptaient-ils faire? Décrocher Jésus de sa croix et accrocher un programme de stretching à sa place? Remplacer la chaire par un banc de musculation avec barre et poids?


*

Se moquaient-ils de lui, ces gens qui regardaient la télé dans leur canapé défoncé tout en ingurgitant des bonbons et des litres de soda? Lui riaient-ils au nez, ces fainéants dénués de toute initiative, allongés dans un lit taché de gras et dont le seul intérêt était de le voir échouer aux prochaines élections? Ils se fichaient totalement d'être la honte du pays. Ils se fichaient totalement de se ridiculiser. Ce n'était pas seulement répugnant, c'était aussi immoral. C'était un crime contre le bien commun.

*

Le pire, c'est qu'on réalise ce qui arrive quand il est déjà trop tard. C'est leur stratégie. De petits changements progressifs pour que personne n'ait le temps de réagir.

*

 Landon avait lu suffisamment de livres sur l'histoire politique pour savoir ce qui risquait de se passer après. Les attitudes fuyantes. Le déni. Tous soudain innocents. Mais la haine n'est pas une idéologie qui  changeait au gré des gouvernements. C'était un cafard qui continuait à avancer, même si on lui marchait dessus. Cette épidémie-là, Joan Svärd ne l'avait pas éradiquée.









Åsa Ericsdotter,
née en 1981 à Uppsala, vit dans le Maine, aux États-Unis, est une auteure suédoise.

L'Epidémie (Actes Sud, 2020) est son premier roman à paraître en France. 





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