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Le Hussard sur le toit ⭐️⭐️⭐️⭐️

Jean Giono



Pour rester dans l’ambiance, une épidémie. Une épidémie historique, celle qui débarque en France en 1832, et se répandra au cours de nombreuses vagues pendant une vingtaine d’années!


Au centre du roman, le héros romantique Angelo, colonel des Hussards qui fuit l’Italie après avoir tué en duel un officier autrichien. Il est fougueux, droit dans ses bottes, portant un regard acerbe sur les comportements peu altruistes des gens qu’il croise au cours de son périple vers Manosque. C’est aussi curieusement un être qui semble asexué, attiré ni par les femmes ni par les hommes qui l’accompagneront sur son chemin. Un auteur contemporain aurait saisi les occasions multiples qui se sont présentées à lui pour glisser dans le texte quelque scène torride, au moins fantasmée. Mais non, ici, rien, à part un baiser chaste.


Quant à la maladie, elle est décrite  de façon si caricaturale, qu’il ne peut s’agir que d’une évocation métaphorique d’un mal plus répandu et universel, l’égoïsme qui reprend le dessus quand il s’agit de sauver sa peau. Les descriptions des phases très accélérées de la maladie, la déshydratation qui tue les victimes en quelques minutes, l’immunité dont seul Angelo bénéficie, tout cela cache une autre intention que de rapporter les ravages de la maladie. 


Point n’est besoin d’épiloguer sur les mesures prises par les autorités, enfermer les cas contacts dans des locaux inadaptés, de telle sorte que atteints ou pas à leur admission en quarantaine, ils finissent par être contaminés. 


Dans ce contexte d’épidémie galopante, la valeur de la vie humaine change de registre. Le passage de vie à trépas n’est plus entouré de rites qui marquent ce départ, les cadavres sont jetés dans les brasiers, et tout s’efface avec eux. Enfants, adultes, vieillards, des destins qui s’envolent en fumée dans l’indifférence générale, avec une population plus incommodée par les odeurs que par la perte d’êtres chers. 


Les villages ferment leur accès, protégés par l’armée, dans une tentative vaine de limiter les dégâts, le mal est partout. Et la paranoïa s’empare des esprits, à la recherche d’empoisonneurs.


Pour décor de ce récit d’aventures, de sublimes paysages, comme Giono sait les peindre, en transmettant tout l’amour qu’il a pour ce pays. 


C’est un classique qui mérite sa place parmi les grandes oeuvres du vingtième siècle, un récit romantique et allégorique qui ne laisse guère d’illusions sur la faiblesse des hommes 





Ils marchèrent plus de trois heures avant de venir à bout d'un chemin pierreux qui circulaient à travers les buis, les genévriers et toute une végétation crispée par une longue sujétion au vent. Les horizons couverts par le ciel bas ne dévoilaient rein d'autre que l'assaut continu des nuages. Ils subirent plusieurs averses rapides mais drues et comme ferrées de petits morceaux de glace. La jeune femme avaient caché sa tête sous le gros capuchon et elle se laissait emportée docilement sans rien dire. 

*

Je sais fort bien que le choléra n'est pas tout à fait le produit de l'imagination pure. Mais il prend si facilement de l'extension, s'il a comme nous disons cette "violence épidémique", c'est qu'avec la présence continue de la mort il exaspère dans tout le monde le fameux égoïsme congénital. 




Jean Giono

Jean Giono est un écrivain français.

Son œuvre mêle un humanisme naturel à une révolte violente contre la société du XXe siècle.

Un grand nombre des ouvrages de Jean Giono ont pour cadre le monde paysan provençal. Inspirée par son imagination et ses visions de la Grèce antique, son œuvre romanesque dépeint la condition de l'Homme dans le monde, face aux questions morales et métaphysiques et possède une portée universelle.


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