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Les Héroïques ⭐️⭐️⭐️⭐️

 Paulina Dalmayer





  • Éditeur : Grasset (13 janvier 2021)
  • Langue : Français
  • Broché : 240 pages
  • Première sélection Prix Orang






Alors que la narratrice se meurt d’un cancer généralisé, ses pensées se bousculent et les souvenirs refont surface. Sept décennies d’une vie riche et d’une histoire nationale mouvementée, celle de la Pologne de l’après-guerre. 

Les pistes de réflexion sont multiples, abordées comme un testament. La carrière hospitalière de pédiatre, et la passion pour le théâtre jamais démentie, terreau d’une érudition artistique certaine sont une toile de fond pour ce parcours  riche.


Même si la douleur physique et la souffrance morale ne sont pas occultées, l’humour est présent tout au long des pages, (je pense à la rencontre à l’hôpital avec le prêtre catholique, qui a dû passer quelques nuits blanches à la suite de leur échange, à se demander où et comment il avait failli ! ) .


Au coeur du propos, le couple, qui a traversé quarante années  de vie commune et que les coups de canif dans le contrat n’ont pas détruit. Les enfants, source inépuisable de questionnements bien au-delà des années nécessaires de protection physique. Le frère, anti-conformiste et fantasque, qui a su trouvé dans un isolement salutaire une alternative à la médicalisation. 


On y mesure aussi l’influence de l’Histoire sur le quotidien, les vocations, le sentiment d’appartenance à une nation malmenée.


Réflexions aussi et bien sûr sur la dualité corps et âme, sur la religion , et ce qu’en disent  les mystiques orientaux, au point de choisir l’Inde pour en finir avec ce parcours.


Si le récit paraît confus dans les premières pages, à l’image des effets secondaire de la morphine, l’intérêt grandit avec au fil des chapitres. De belles formules « les recoins empoussiérés de l’intime », et une des plus belles déclaration d’amour que j’ai pu lire, une très belle plume. 




Ça croît, avance, monte, me presse la cage thoracique, le sternum, le rachis, broie à mes 12 paires de côtes, remplit le médiastin. J'ai l'impression de regarder un film qui se joue à l’ intérieur de moi-même, tourné en 16 images/secondes. Cet effet accéléré devrait m'inciter à appeler l'infirmière, ce que je ferais si je savais qu'elle était capable de me soulager d'une quelconque manière. D'évidence il n'en est rien.


*


Je rêve d'un paysage léger, nouveau, incompréhensible, mais spirituel… Un lieu où je ne serai pas trop seule, vois-tu au milieu des mortels qui s’ignorent. As-tu remarqué qu'ici les gens pensent qu'ils ne mourront jamais, jusqu'à ce que ça leur arrive ? 


*



Je lui coupe la parole, prenant conscience que notre affaire nous entraînera inéluctablement dans les recoins empoussiérés de l’intime.


*



Comment veux-tu que je fasse maintenant ? Tu es mon album de jazz préféré, tu es ma maison, tu es ma raison folle, tu es ma retraite, tu es mon verre de vodka… Parle à ta maladie, je t'en supplie ! Il y a ces trucs d'auto persuasion qui marchent très fort…


*


Les grosses lettres déliées, tracées par Konrad sur une serviette en papier, en disent long de sa désintégration. Jadis son écriture était élégante, souveraine mais retenue un accident et un divorce plus tard elle est devenu désespérée.









Paulina Dalmayer est une journaliste polonaise qui vit à Paris








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