R.J. Ellory
« Les Devereaux arrivèrent à Jasperville en avril 1969. Eisenhower était mort, l'assassin de Bobby Kennedy était voué à la chambre à gaz, et les pertes au Vietnam excédaient celle de la Corée. Mais, pour les Devereaux, le reste du monde n'aurait pas pu être plus lointain et inconnu. »
Jasperville. « Le trou du cul du monde, mais gelé jusqu’à l’os ». On n’y va ni pour le tourisme, ni par hasard. C’est la loi du marché du travail qui vous y conduit, la promesse d’un emploi bien rémunéré, d’un logement, de quoi subvenir aux besoins de la famille. Le climat est très rude, dans ce nord ouest du Canada où l’hiver dure huit mois, huit longs mois sans lumière. A proximité des monts Torngat, « lieu des esprits mauvais » en inuktitut, ce sont les mines de fer qui créent l’attraction.
Des animaux sauvages s’ajoutent à la liste des dangers du secteur. Aussi lorsqu’une première jeune fille est retrouvée déchiquetée non loin de son domicile, les loups sont accusés.
Si Jack revient sur les lieux de son enfance après 26 ans d’absence, c’est que son frère se trouve en fâcheuse posture : il est en garde à vue après avoir agressé un homme, dont la survie ou non conditionnera l’importance de la peine.
Ce retour aux sources fera resurgir de nombreux souvenirs et qu’il aurait voulu oublier à jamais. Et devant l’immobilisme de la police locale, argumenté par la brièveté des contrats sur le poste, Jack mène l’enquête, en reprenant les nombreuses notes de son frère.
On est saisi par l’art de restituer l’ambiance de cet endroit si inhospitalier, et de ce que cela fait aux hommes. Pas de risque que le roman fasse affluer les touristes, si l’endroit n’était pas fictif. Les légendes du peuple autochtone hantent le récit. Et si le wendigo était à l’origine des meurtres en série ?
Le personnage central, dont on suit au fil des chapitres l’itinéraire pas toujours serein, est très intéressant et bien campé : un amalgame de forces et de fragilités qui le rend profondément humain.
Un excellent polar, tant pour les personnages que pour le décor et pour l’enquête passionnante.
408 pages Sonatine 5 janvier 2023
#Unesaisonpourlesombres #NetGalleyFrance
La maison avait été conçue comme une pièce unique, à laquelle d'autres étaient venues s'ajouter au hasard et sans planification. Elle donnait l'impression d'un labyrinthe, aux angles étranges et aux murs irréguliers. Entre le palier et la chambre, le sol descendait d'une quinzaine de centimètres. Les chambres elles-mêmes, faisant figure de caisses dépareillées, comme si une boîte à chaussures, et peut-être un étui de saxophone, s'étaient perdus au milieu de cagettes d’orange, le tout tenant davantage par l'action de la gravité et de la tension que par celle de vis et de boulons.
*
Je ne sais si toutes les femmes confondent ce qu'elles entendent est ce qu'elles croient entendre… En tout cas, ce que je veux dire, c'est qu'il se punit lui-même à cause de ce qu'il a fait. Il a ruiné des vies. Il a laissé des gens sans rien.
–Tu penses que Dieu nous punit tous ?
–Non, répondit Henri. Les hommes se punissent tout seul. Dieu n'est là que pour porter le chapeau.
*
On fait tous des conneries, certains plus que d’autres. Mais tu sais, l’important, ce n’est pas la chute. C’est la manière de se relever.
Né en 1965, Roger Jon Ellory est un auteur anglais de romans policiers et de thrillers.
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