Hernán Diaz
L’histoire qui ouvre le roman n’est pas sans intérêt : la rencontre de deux êtres hors norme dont l’originalité les conduit à ce que l’on pourrait appeler une carrière brillante, si la perspicacité dans les affaires financières est considérée un témoin de réussite.
Lorsque cette narration prend fin, un sentiment d’étrangeté peut saisir le lecteur, il semble que l’on nous raconte une deuxième fois l’histoire, à quelques nuances dans les noms des personnages et encore plus étonnant, des notes intercalées dans le texte, comme de futurs paragraphes à compléter…
Il faudra arriver à la troisième partie pour comprendre la malice de l’auteur qui nous piège avec ces histoires gigognes, tout en nous faisant comprendre tout l’enjeu de relater une biographie, que la variabilité des sources et des enjeux sous-tendus par l’écriture rend complexe.
En plus de nous offrir un panorama de l’histoire des Etats-Unis du début du vingtième siècle, alors qu’une croissance effrénée faisait déjà craindre le pire en matière d’avenir, on a une véritable analyse du processus de la création littéraire, portée par des personnages suffisamment atypiques pour être accrocheurs.
397 pages L’olivier 18 août 2023
Traduction : Nicolas Richard
La plupart d’entre nous préfère croire que nous sommes les sujets actifs de nos propres victoires mais seulement les objets passifs de nos défaites. Nous triomphons, mais ce n’est pas vraiment nous qui échouons - nous sommes ruinés par des forces qui nous dépassent.
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Chacune de nos actions obéit aux lois de l’économie. Quand nous nous réveillons le matin nous échangeons du repos contre du profit. Quand nous allons nous coucher le soir nous renonçons à du temps potentiellement profitable pour reprendre des forces.
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Plus on est près d’une source de pouvoir, plus l’ambiance devient calme. L’autorité et l’argent s’entourent de silence, et on peut mesurer l’influence de quelqu’un à l’épaisseur du silence qui l’enveloppe.
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Les histoires manquaient de ces petits détails (un objet quelconque, un endroit précis) et colifichets verbaux (une marque, un tic de langage) souvent utilisés pour amadouer les lecteurs en leur faisant croire à la véracité de ce qu’ils lisent.
Hernán Diaz est un écrivain argento-américain né en 1973
Il est aujourd'hui directeur adjoint de l'Institut hispanique de l'Université Columbia.
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