Stephen Markley
Impressionnant dès le premier coup d’oeil , avec ses mille pages ! Le thème, les rumeurs et les quelques avis glanés sur la toile sont malgré tout tentants. Un premier chapitre nous met en garde contre les dangers des hydrates de méthane, piégés dans les clathrates, qui risquent fort de se libérer des profondeurs de notre planète qui se réchauffe. Suivront en chapitres alternés une succession de personnages et de groupes, dont l’évolution sur quarante ans, suit l’inexorable dégradation de nos conditions de vie sur terre.
La description de l’évolution climatique est tellement probable que l’on n’a même pas l’impression de lire de l’anticipation. C’est bien sûr glaçant, d’autant que le roman met bien en évidence les priorités des politiques dont l’apparent intérêt pour l’écologie sous-tend des manoeuvres pour récupérer des électeurs. Manipulations et traitrise sont les maitres mots de la gouvernance.
Il faut s’attendre malgré tout à une lecture exigeante, qui ne peut rester superficielle, au risque de s’y perdre complètement, cat les personnages sont nombreux et leurs pôles d’intérêt parfois distincts juste par la nuance.
En revanche, pour qui se passionne pour l’évolution politique américaine, mais aussi mondiale, c’est une mine d’or, un texte qui décortique les mécanismes qui régissent la lente mais certaine évolution vers le totalitarisme et la dictature.
Une lecture marquante, dont je ne retiendrai pas les personnages, sans doute trop nombreux mais l’ambiance générale, qui nous donne l’impression que le top départ est donné et que nous le constatons chaque jour en suivant simplement les actualités. Et que quoiqu’il advienne, nul de prendra les bonnes décisions pour nous sortir de ce pétrin.
1039 pages Albin-Michel 21 août 2024
Traduction : Charles Recoursé
Et une fois que t’as pigé le rapport entre le ketchup et le statu quo impérialiste, c’est dur de ne pas se laisser démoraliser. C’est comme les illusions d’optique : la première fois t’as du mal, mais quand tu comprends le truc, tu ne vois plus que ça.
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La mort n’est jamais qu’une manifestation de la deuxième loi de la thermodynamique : les choses tendent vers un état d’entropie maximale. La dégradation constante de tout. L’ultime régression vers la moyenne. Je trouve ce principe presque excessivement utile .
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Je voudrais seulement que tu comprennes que le bonheur, ça consiste à utiliser ses talents pour faire des choses qui nous dépassent. Ça n’ a pas besoin d’être religieux. Il suffit juste qu’une cause soit noble..
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On vit sur une magnifique petite boule bleue, qui déborde de joie, et qui avait une chance sur un milliard d'exister, au milieu d'un univers immense et glacial. Donc, soit on contente d'être une bande de gentils bénis-oui-oui, qui s'auto congratulent, soit on fout le bordel. On balance un coup de pied dans la fourmilière et on fout le feu la politique..
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Pour le citoyen lambda, qui tapotait sur son téléphone, le monde devenait de plus en plus déroutant et agressif, et, pendant ce temps, à son insu, lui-même, laissait des données qui définissaient sa psychologie, laquelle était ensuite échangée et marchandée entre observateurs de tout poil
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Une fois qu'il commencera à fondre, c'est toute la civilisation humaine qui accusera le coup. On ne parle pas d'un pauvre rhume avec un taux de mortalité à peine supérieur à la normale. Là, c'est près de 4 millions de kilomètres de cubes de glace qui vont se dissoudre dans les océans. Même si les effets reste localisés et légers, ils pourraient être dramatique pour la survie de l'humanité, mais vous, vous restez assis sur votre cul avec des airs de bébé tout content.
Stephen Markley est un écrivain américain, né en 1983. Avec son premier roman, Ohio (2018), il s’impose comme un formidable cartographe de l’Amérique contemporaine et de ses fractures. Ce roman est en cours d'adaptation télévisée aux États-Unis.
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