Valentine Goby
Les premières pages de ce roman sont déroutantes. Cette petite fille passionnée d’odeurs et de mots, qu’elle consigne soigneusement dans son cahier, est un personnage peu ordinaire !
L’histoire se construit autour d’un palmier, déclaré malade, dévoré de l’intérieur par des charançons. Sa punition première, qui en même temps une tentative de sauvetage, et de l’étêter, de lui couper ce qui fait son panache. La petite scrute aux jumelles l’extrémité de ce végétal, a la fois emblématique de la région et pièce maitresse d’un jardin du sud. Mais rien ne semble indiquer une reprise de végétation.
L’enfant observe, se nourrit de mots, et des histoires rapportées par son père, souvent absent, parti ailleurs pour rechercher des senteurs particulières, destinées à l’industrie du parfum.
Mais l’enfant exprime bientôt une angoisse profonde, et des crises de panique nocturnes. En l’absence du père pas de problème pour rejoindre le lit de la mère, mais lorsqu’il rentre, elle doit trouver d’autres subterfuges pour ne pas être seule dans sa chambre…
C’est avec beaucoup de grâce et un savoir faire remarquable que Valentine Goby nous conte cette histoire de traumatisme psychique, dont le souvenir enfoui trouve des voies détournées pour se manifester.
On est plongé dans un univers de plantes et de parfum, ce qui fait de ce roman une bible de connaissances botaniques, que l’on acquiert au rythme de l’enfant.
Après un temps d’adaptation pour comprendre le message et le chemin pour y parvenir, j’ai pris un grand plaisir à la lecture de ce roman.
256 pages Actes sud 25 août 2025
L'herbe courte et cassante poinçonne ses plantes de pieds, elle n'y prête aucune attention. Pas plus qu'à la mèche collée en travers de son front ou qu'à la grosse mouche qui vibrionne dans sa nuque. La paume refermée sur le poil de la chienne, elle regarde l'homme casqué, ganté de fer, carapaçonné de rouge et noir, fendre la fixité de ce matin d’août, se hisser vingt mètres au dessus du sol, une tronçonneuse fichée dans le dos.
*
La merveilleuse odeur la tire de sa rêverie. Elle saisit la mouillette, ferme les yeux, inspire, expire, plusieurs fois. C'est puissant et doux en même temps. L'odeur se déploie en couverture moelleuse. Une odeur de tous les mauves, les violets, de laine profonde et de cashmere, de lait et de terre après la pluie.

Née en 1974 Valentine Goby est une écrivaine française
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